La marge a beaucoup à nous apprendre

La marge a beaucoup à nous apprendre

18 février 2020 4 Par Claudine

« Utiliser les bordures et valoriser la marge » est l’un des principes proposés par la permaculture. Si, en général, on pense aux bordures entre deux écosystèmes et aux marges des zones de cultures, toutes les sortes de bordures et de marges sont des trésors de ressources…

Bordures et marges

En permaculture, la bordure fait souvent référence à la zone entourant des espaces cultivés ou aménagés ; bord d’une butte de culture, bordure d’un chemin, d’une marre, d’une haie… Souvent « laissées pour compte » en raison des difficultés pratiques que l’on peut trouver à les cultiver, les bordures sont pourtant une source incroyable de vie, car elles combinent les caractéristiques et les avantages des deux types d’écosystèmes entre lesquels elle se trouve. Dans la nature, la lisière de forêt en est un exemple parfait : ensoleillée mais plus fraiche qu’une zone défrichée, au sol meuble et absorbant mais plus vite réchauffé au printemps, la lisière offre de bonnes conditions autant pour les espèces aimant la forêt que pour celles appréciant la prairie, ainsi que pour de nombreuses autres plantes et créatures typiques des lisières. Cornes d’abondances, ces zones sont donc avantageuses à valoriser, autant pour la Nature que pour l’Homme, et c’est pourquoi on cherchera parfois à créer des zones de bordure aussi vastes que possible. On choisira, par exemple, d’augmenter la longueur totale des contours de notre marre en lui donnant une forme très irrégulière.

La marge, quant à elle, est aussi une bordure… Que l’on a tendance à oublier car elle se trouve au bord de quelque chose, sans vraiment en faire partie non plus. Prenons l’exemple d’un champ cultivé en agriculture conventionnelle, séparé d’un champ bio par une « zone tampon ». Cet espace ne peut pas être cultivé en bio, et ne fait pas partie du champ conventionnel… A la marge de ces deux champs, on pourrait penser qu’il ne sert à rien ni personne. Que nenni ! Puisque cette zone n’est pas cultivée, elle peut s’épanouir dans son plein potentiel : on y trouvera toutes sortes de plantes et d’insectes absents des espaces cultivés, et le sol se régénérera progressivement grâce à l’absence de culture. En somme, cette zone sera belle et vivante à sa façon, pleine de ressources inexistantes dans les cultures bios et non bios qui l’entourent, et pourtant infiniment utile pour chacune  de ces cultures (par exemple, les insectes qui y vivent sont de précieux auxiliaires à la régulation de certains ravageurs).

Et dans le quotidien ?

Notre société n’est que bordures et marges. Si l’on pense à nos « zones » du quotidien, par exemple le temps de trajet entre la maison et le travail est une bordure, tout comme le moment séparant l’éveil du sommeil. Cela vous semble tiré par les cheveux ? Et pourtant, chacune de ces périodes peut être valorisée : le trajet entre maison et travail peut être « optimisé » en faisant du co-voiturage, en passant faire des courses sur le chemin, en appelant un ami ou en lisant un livre dans le train… Alors que le moment entre éveil et sommeil peut être l’occasion d’une courte méditation relaxante.

Les marges humaines

Cependant, de toutes les marges qu’on oublie souvent, la marge humaine est probablement la plus importante. Il ne revient qu’à vous d’identifier qui est, selon vous, « à la marge » : il se peut par exemple que votre voisin, par ailleurs tout à fait « normal » selon les critères de notre société, soit à la marge de vous-même car ses idées, ses façons de faire et ses habitudes sont profondément différentes des vôtres. Or, comme toutes les marges, la marge humaine recèle de précieuses ressources que vous pouvez valoriser. Peut-être que le mode de vie et de pensée de votre voisin vous agacent au plus haut point, il n’empêche que sa personne regorge de connaissances et de qualités que vous n’avez pas. Par ailleurs, sa façon de voir, bien loin de la vôtre, pourrait vous donner à l’occasion un regard neuf et salutaire sur une situation, un questionnement… Et faire naître de nouvelles idées bénéfiques pour vous et votre projet.

C’est parfois en pensant qu’on est très ouvert-e, qu’on est au contraire très borné-e… En sachant reconnaître que chacun-e peut être utile aux autres, on valorise la marge tout en favorisant de précieux échanges, pour une vie pleine de partage 🙂