« De saison », ça veut dire quoi ?

« De saison », ça veut dire quoi ?

9 février 2021 0 Par Claudine

Voici venir la Saint-Valentin, date de l’apparition des fraises sur les étals des supermarchés. Vous trouvez probablement cela aberrant… Mais bien d’autres illogismes se cachent dans nos habitudes alimentaires, sans même que nous nous en rendions compte. Électricité cachée, te voici démasquée !

Les serres chauffées…

Des tomates ou des fraises en hiver, tout le monde sait que ce n’est pas naturel et nécessite des serres chauffées. Oui, mais ne nous leurrons pas : pour avoir par exemple des concombres, aubergines, courgettes suisses dès le printemps, il est nécessaire pour nos maraîchers locaux de faire pousser leurs plantons dès la fin de l’hiver dans des serres immanquablement chauffées. Selon les légumes et la saison, les serres devront même être chauffées durant tout le cycle de la plante, c’est-à-dire pendant plusieurs mois. C’est le cas de nombreux légumes que nous dégustons au printemps, convaincus qu’ils sont « de saison »… Alors que la véritable saison des tomates cultivées sous serre non chauffée s’étend seulement de juin à octobre !

Mais alors, si l’on souhaite vraiment des tomates, aubergines et courgettes en mars, faut-il plutôt consommer celles qui viennent d’Espagne ou d’Italie, là où il fait plus chaud ? Non. Car même en Espagne et en Italie il est nécessaire en hiver de chauffer les serres pour que les légumes grandissent et fructifient. Si vous avez absolument envie d’une tomate au mois de mars, sachez qu’elle aura forcément été cultivée sous serre chauffée. Alors, pourquoi ne pas opter simplement pour le coulis confectionné en plein cœur de l’été ?

…Et les chambres froides

La problématique des serres chauffées, énergivores, a fait surface il y a quelques temps déjà, mais il est bien rare de se poser la même question pour les frigos. Les frigos ?

Pensez à une jolie pomme Gala, bien juteuse, que vous appréciez tant déguster en plein été. Or, la saison des pommes n’est ni juin ni juillet, mais bien de fin août à octobre pour les pommes fraiches, et jusqu’à avril-mai pour les pommes de garde (et la Gala n’en est pas une). Mais alors, comment se fait-il que nous trouvions ces belles pommes sur les étals estivaux ? Souvent, tout repose sur la réfrigération. Ainsi, une pomme dégustée en été aura été réfrigérée pendant des mois, généralement en atmosphère appauvri en oxygène pour ralentir l’oxydation (et la dégradation) des produits. La réfrigération est donc utilisée pour la conservation de nombreux fruits et légumes, parfois sur de longues périodes, afin de les vendre toute l’année. Est-ce mieux que les serres chauffées ? La question de pose.

Au final, c’est quoi le problème ?

On peut se demander aussi, au final, quel est le problème posé par ces serres chauffées et ces chambres froides. Les légumes sont locaux et nous permettent d’avoir des vitamines toute l’année, alors quoi ? Il se trouve que, même si ces méthodes sont bien pratiques, elles reposent sur des centrales nucléaires, des barrages, des mines de charbon, quand bien même il existe des méthodes de conservation ne nécessitant pas d’électricité ou presque (demandez à vos grands-mères 🙂 ), et qu’il est tout à fait possible de faire pousser une grande variété de légumes au printemps en attendant l’arrivée des fameuses tomates.

On peut se questionner enfin à propos de la teneur en nutriments d’une plante cultivée sous serre ou réfrigérée durant des mois, comparée à une plante ayant poussé à la saison que la Nature a prévue pour elle…

Mais alors, que peut-on manger ?

La diversité de fruits et de légumes est beaucoup plus vaste que ce qu’on imagine généralement, même en hiver : bien des aliments se conservent des mois dans des caves fraîches mais non réfrigérées ou peuvent être cultivés en hiver. Betteraves, oignons, poireaux, choux, panais, carottes, céleris, courges, chicorées… et bien d’autres encore, frais, cuisinés ou lacto-fermentés, offrent de quoi ne pas se lasser. Ajoutez à cela des graines germées, des épinards, de la mâche et des endives, et vous obtiendrez une belle salade bien fraîche !

Quant aux fruits, certaines variétés de pommes et de coings se conservent convenablement durant des mois (j’ai utilisé ce soir mes dernières pommes de garde, cueillies cet automne… un délice !). En attendant les premières baies du printemps, vous pourrez aussi déguster vos compotes préparées à l’automne ainsi que des fruits séchés réhydratés, et des kiwis.  

Si comme moi vous avez de la peine à vous passer de fruits frais et ressentez le besoin d’un peu de diversité, nos pays limitrophes offrent une certaine variété de fruits « exotiques » dont la saison est justement l’hiver. Les agrumes en font partie, pour notre plus grand plaisir. Mais, exotiques ou pas, n’oubliez pas que les fruits qui viennent de plus loin ont aussi leur saison !

Un guide pour s’y retrouver

Ça y est, vous avez décidé de faire attention à votre consommation « cachée » d’électricité et souhaitez acheter autant que possible des fruits et légumes de saison, la vraie saison… Mais comment s’y retrouver ? Le WWF nous offre un guide très pratique (ici) qui ne comprend que les fruits et légumes suisses qui peuvent être cultivés et conservés sans chauffage ni réfrigération. Même s’il ne détaille pas les périodes de garde des différentes variétés (car cela varie), c’est un excellent guide pour démarrer, le temps de connaître les spécificités des variétés locales.

Maintenant, il ne reste plus qu’à apprendre de nouvelles recettes ! 🙂